Réponse à Monsieur le député Jean-Baptiste Moreau

Réponse à Monsieur le député Jean-Baptiste Moreau. Monsieur le député Jean-Baptiste Moreau, vous manquez de respect au monde paysan. Vendredi 26 juillet 2019, des agriculteurs ont muré l'entrée de votre permanence, suite à votre vote en faveur de la ratification du CETA. Monsieur Moreau, vous avez affirmé que c'était une «action violente» et que vous alliez porter plainte. En quoi murer l'entrée d'une permanence est une «action violente»? Si vous portez plainte contre les auteurs de cette "simple" action, nous devrions peut-être porter plainte à notre tour contre l'État et ses représentants pour «non assistance à paysan en danger»? Car, à force de faire des promesses en tous genres au monde paysan, il ne faut pas s'étonner de la réaction de certains agriculteurs qui n'est que le reflet de l'état d'esprit de la majorité d'entre eux. Ne vous déplaise , l'État, l'Europe sont en partie responsables de la situation dans laquelle se trouve l'agriculture française. Depuis les années 1970, la folie libérale emporte tout. Les gouvernements successifs et un certain syndicalisme ont poussé les agriculteurs à agrandir leurs exploitations et à compresser leurs coûts de production, pour être compétitifs… La logique même de cette politique libérale, c'est d'exporter pour importer. Cela ne peut plus durer. Il est temps que tous les représentants de l'État réfléchissent à ce qu'ils veulent comme agriculture en France. Pour ma part, le choix est fait, le choix d'une agriculture avec des fermes familiales, traditionnelles, ancrées sur des territoires à visage humain. Mais pour maintenir ce type d'agriculture en France qui est de plus en plus menacé au fur et à mesure que nous avançons, il faut un certain volontarisme politique, notion que beaucoup de politiques ont perdu. Alors quand vous pointez l'inorganisation de la filière bovine et de son incapacité de peser face aux abatteurs et aux distributeurs, cela me fait rire de colère. N'était-ce pas l'objectif des Egalim dont vous étiez l'une des figures de proue? Les États généraux de l'alimentation devait permettre un inversement de la construction du prix, partant donc du paysan, un meilleur rapport de force… Mais quand il n'y a pas de contraintes envers les distributeurs pour mieux rémunérer les producteurs, ce plan (vraiment voulu ?) échoue. Vous pointez l'inorganisation de la filière bovine...mais alors, vous qui êtes éleveur de limousines dans la Creuse (grand bassin d'élevage), qu'avez-vous fait pour pallier à ce manque d'organisation ? Et de surcroît lorsque vous étiez président d'une coopérative? Vous pointez le manque de stratégie conquérante pour l'export… Si, car la folle stratégie actuelle, c'est d'exporter nos produits français, reconnus dans le monde entier pour leur saveur, leur forme et goût inimitable qui ressemblent tant à nos terroirs et territoires,pour importer des produits fabriqués dans des normes sanitaires et environnementales plus basses que les nôtres et qui ne respectent pas nos standards de production. Vous soulignez que dans d'autres départements, la filière sait mieux s'organiser en Creuse...c'est déjà un manque total de respect envers les éleveurs creusois. Vous soulignez la capacité de vos "collègues" (est-ce vraiment encore le cas ?) extérieurs à s'adapter au changement climatique. Les agriculteurs sont prêts à s'adapter. Mais pas sans accompagnement, sans changement de modèle agricole, insufflé par les politiques. Car si les gouvernements qui se succèdent continue à vouloir détruire notre type d'agriculture pour copier sur tel ou tel modèle (la Nouvelle-Zélande notamment dont on peut voir que ce dernier s'effrite), ce changement, cette adaptation, sera caduque. Vous soulignez également leur capacité à monter en gamme, en vertu des états généraux de l'alimentation. Mais pourquoi faire monter en gamme la production de nos paysans et importer de la nourriture qui ne respecte absolument pas nos standards de production, européens et français. C'est d'un non sens absolu, et nous n'en voulons plus car il n'est pas tolérable. Le 23 juillet 2019, et cela a été la cause de l'action des agriculteurs contre votre permanence, vous avez voté en faveur du CETA, en jurant que si ce traité mettait en péril vos "collègues", vous ne le défendriez pas. Oui Monsieur Moreau, ce traité met en péril l'équilibre, déjà fragile, de plusieurs filières (porcine, bovine, céréales). Vous essayez, comme d'autres députés de votre bord politique, de nous rassurer en affirmant que ce traité respecte l'écosystème, nos productions agricoles… Il ne respecte pas l'écosystème, avec des avions ou navires qui vont transporter, davantage, des denrées alimentaires... malfamées. Il met en péril la démocratie car une multinationale qui se verrait en danger parce qu'un Etat voterait une loi contre ses propres intérêts, pourrait porter plainte contre l'État en question. Vous demandez aux agriculteurs de proposer pour sortir de la crise plutôt que de faire ce type d'actions contre les permanences... Plusieurs propositions ont été soumises pendant les états généraux de l'alimentation pour redéfinir le type d'agriculture que nous voulons en France, le chemin à prendre, la politique à adopter. Mais elles ont été balayés d'un revers de la main. Les gouvernements successifs ont enfermé les agriculteurs-trices dans un piège en leur promettant, bonheur avec un modèle fondé sur l'agri-industrie avec des fermes industrielles, sur l'autel de la dérégulation et de la libéralisation. Or voici ce que ce modèle nous coûte, la sécurité et la souveraineté alimentaire. La philosophie agricole à adopter serait « Libre pour gagner, réguler pour ne pas perdre ». Pour nourrir l'humanité il faut une volonté politique considérable à l'échelle mondiale. L'avenir de l'agriculture française doit se construire avec des exploitations familiales et vivrières (la terre est faite pour produire de quoi nourrir les hommes). Monsieur le député Jean-Baptiste Moreau, par votre manque total de respect envers le monde paysan, dont vous êtes vous-même issu, cela fait de vous la honte de la profession. Et votre vote en faveur du CETA amplifie cette image et fait de vous, un traître à la profession agricole. Je ne vous salue pas Monsieur le député, cordialement. Valentin Lagorio, secrétaire général adjoint à l'Union du Peuple Français.

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